La Fin de la guerre froide by Juan Trejo

Auteur:Juan Trejo [Trejo, Juan]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
ISBN: 9782330080907
Publié: 2017-05-01T22:00:00+00:00

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1 Courant du cinéma espagnol correspondant à la levée de la censure franquiste dans l’art et les spectacles, qui permit l’apparition des nus au cinéma. (Toutes les notes sont de la traductrice.)

2 En français dans le texte.

11

Dans le taxi, une Audi A4 neuve à l’intérieur tapissé de cuir, la voix de velours d’Iñaki Gabilondo, l’animateur le plus en vue de la radio matinale, flottait comme un murmure, alors que les immeubles et les passants défilaient de l’autre côté de la vitre. Dona ne pouvait pas le savoir, parce qu’elle pensait à autre chose, mais le speaker de Saint-Sébastien annonçait que le gouvernement français avait menti délibérément à ses concitoyens sur la trajectoire du nuage radioactif de Tchernobyl.

Dona avait remis le livre du frère Franzen dans son sac, et ce dernier s’était enseveli dans le fond sédimentaire jusqu’à y disparaître tout entier. Les souvenirs de sa dernière visite à Indianapolis chez sa sœur, de son père caché dans la maison des voisins, de sa mère atteinte du syndrome de Diogène et internée dans un hôpital psychiatrique, cette fois à vie, sombrèrent avec lui.

Le taxi descendait maintenant la rue Urgell sur la seule voie libre, de la place Francesc Macià à la rue París, et croisait les pare-chocs des voitures, des bus et des camions des six redoutables voies ascendantes. Une station-service perpendiculaire à la descente d’Urgell était installée au carrefour depuis quelques années. C’était également le point de départ de l’avenue Sarrià qui conduisait aux quartiers plus cossus de l’ouest de la ville. Le taxi obliqua à gauche dans la rue París, laissant le mur, les constructions à peine visibles et la haute façade de l’ancienne École industrielle sur sa droite. Le taxi suivit la rue París, traversa la rue Villarroel puis la rue Casanova jusqu’à arriver à Muntaner. Là, il tourna à droite et entama la longue descente vers la Gran Vía de les Corts Catalanes. Alors qu’ils passaient dans le quartier de l’Eixample, Dona songea qu’elle ne comprenait pas pourquoi elle avait entendu dire si souvent que Barcelone était la ville européenne la plus branchée du moment (qui avait bien pu lui dire ça, d’ailleurs… Donald, qui adorait cette ville, ou Günter, qui avait réservé une table au Kimiya plusieurs mois à l’avance pour l’emmener dîner dans ce restaurant ?). Dans la rue Muntaner, elle aperçut sur sa droite, à l’angle de la rue Rosselló, la façade de l’hôpital Clínic. À ses yeux, rien ne distinguait Barcelone des autres villes d’Europe. Dona aurait pu se trouver dans une rue de Paris, de Bruxelles, de Lisbonne, de Rome… des villes qui n’étaient pour elle que des noms, une toile de fond où se détachaient ponctuellement quelques adresses pour faire du shopping, se restaurer, dormir, atterrir ou prendre un avion. Ces rues structurées en quadrillage lui rappelaient San Francisco, Philadelphie, New York et même, en cherchant bien, Sacramento. Certes, les immeubles étaient plus anciens, la ville avait une longue histoire, mais à part ça… Les boutiques lui semblaient hors de prix.

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